Démembrement, nue-propriété ? Que veulent dire ces termes ? En quoi consiste cet acte juridique et quels en sont les avantages fiscaux ? nous allons aborder cela…

Un petit peu de vocabulaire pour commencer :
La propriété, Juridiquement, se décompose en trois parties, comme indiqué dans le schéma ci-dessous en : usus, fructus et abusus.

L’usufruitier peut donc soit utiliser le bien pour son propre usage, soit le donner en location et en percevoir les loyers (fructus).
Le nu-propriétaire quant à lui conserve le droit de disposer du bien, à terme, en respectant les droits de l’usufruitier.
On parle donc de démembrement lorsque ces trois composants de la propriété (droit d’utiliser le bien, droit d’en disposer et droit d’en percevoir les fruits) ne sont plus au nom de la même personne. Les droits d’usufruit et de nue-propriété peuvent être transmis soit par donation, soit par cession (on peut acheter ou vendre ces droits).
Pourquoi démembrer ?
Cet acte juridique consiste à diviser la pleine propriété en nue-propriété et usufruit afin de réduire les coûts fiscaux souvent utilisé en famille lors d’une donation ou d’une succession.
En effet, suite au décès de l’usufruitier, le démembrement prend donc fin et à ce moment, le nu-propriétaire devient l’unique propriétaire du bien sans droits de succession à payer. (reconstitution de la pleine propriété)

Il peut alors l’occuper, le louer ou encore le vendre. On dit alors qu’il y a remembrement de la propriété. C’est une formule très utilisée qui permet de préparer sa succession tout en s’assurant de conserver la jouissance du bien.
La loi de finances pour 2019 (article 109 – devenu l’article 64 a du code des procédures fiscales) a légèrement modifié le régime de l’abus de droit, qui ne caractériserait plus désormais les actes réalisés dans un but exclusivement fiscal mais également ceux réalisés dans un but principalement fiscal. Toutefois, cela ne concerne pas les transmissions anticipées de patrimoine, notamment celles pour lesquelles le donateur se réserve l’usufruit du bien transmis
Un outil fiscal avantageux lors des donations
Régulièrement nous procédons au démembrement de propriété pour préparer une succession en famille. Avec ce principe, il est donc possible de donner de son vivant la nue-propriété d’un bien à ses enfants par exemple, et d’en conserver l’usufruit. Ce que nous vous conseillons de faire afin de continuer à profiter du bien immobilier c’est à dire d’y habiter ou de le louer pour en tirer un revenu et surtout ne pas se démunir.
L’intérêt réside par le fait de transmettre votre patrimoine en profitant des abattements fiscaux en vigueur.
Pour rappel :
Il est possible de donner, par parent et par enfant, la somme de 100 000 € tous les 15 ans (depuis le 31 juillet 2012), sans avoir à acquitter de droits de donation.
Exemple : Un couple avec deux enfants peut ainsi donner en franchise d’impôt la somme de 400 000 €.
· 1er avantage : Ici l’avantage réside sur le fait que les droits de donation sont réduits car ils ne sont pas calculés sur la valeur totale du bien mais sur la seule nue-propriété. (après abattement des 100.000 € vu ci-dessus)
· Les valeurs respectives de la nue-propriété et de l’usufruit d’un bien fluctuent selon l’âge du donateur au jour de la donation ; la valeur de la nue-propriété augmentant en même temps que l’âge du donateur.
· Plus vous donnez ou transmettez tôt plus la valeur de la nue-propriété est faible (donc un potentiel de donner plus avec à la clé moins de frais de donation)
Ci-dessous tableau des pourcentages selon l’âge du donateur :

· 2ème avantage : Au décès du ou des usufruitiers, les enfants récupèrent le bien en pleine propriété sans avoir de droits à payer.
Exemple : Mr et Mme Robert ont un seul fils. La valeur de leur maison est de 250.000 €. Démembrement fait à 68 ans.
Calcul des frais de succession :
Sans démembrement : 250.000 € – 100.000€ (abat)=150.000€ soit environ 28.000 € de frais
Avec démembrement : 250.000€ x 60% = 150.000€ -100.000 (abat) = 50.000€ = environ 8.000€ de frais.
Dans cet exemple, très minimaliste, ne sont pas pris en compte les valeurs mobilières, les autres biens (appartement, voiture…) Le gain sera d’autant plus important si le patrimoine est important et si le démembrement se fait tôt.
Nous restons à votre disposition pour faire une simulation ainsi que la mise en place du montage juridique.
Un procédé souvent utilisé lors des successions
Lors d’une succession nous appliquons le même principe : le conjoint survivant récupère l’usufruit des biens de son conjoint décédé par leg ou testament et les enfants recueillent alors la nue-propriété. Ceci permet au conjoint usufruitier de pouvoir utiliser tous les biens et en percevoir les revenus, par exemple habiter ou donner en location le logement familial. Une fois de plus, la valeur de la nue-propriété est fonction de l’âge de l’usufruitier (soit le conjoint survivant dans cet exemple), au moment du démembrement.
Dans ce cas, plus le démembrement se fait tard plus la part d’usufruit sera faible.
Outre l’intérêt de ne pas être démuni face aux héritiers, pour les personnes soumises à l’IFI, il existe un autre intérêt : celui fiscal. En effet, partir de 2018, la valeur de l’usufruit d’un bien suite à la succession de son conjoint, ne sera pas celle en pleine propriété mais seulement celle de l’usufruit.
Autres cas
- Il existe la donation temporaire d’usufruit, elle présente quelques avantages (diminuer son IFI, faire bénéficier à un enfant d’un logement..) mais aussi des inconvénients (risque de remise en cause par les impôts, droit de mutation et perte de l’avantage du démembrement lorsque celui se termine par le retour à la pleine propriété)
- Il est possible de pratiquer le démembrement sur un compte titres ou un contrat d’assurance vie (c’est plus rare) mais pas sur un PEA, un livret d’épargne ou encore un plan d’épargne logement.
- Vous pouvez acheter selon certains programmes, la nue-propriété d’un bien neuf avec une décote allant de 30% à 50% sur le prix d’achat. En contrepartie vous cédez temporairement l’usage du bien (l’usufruit) à un professionnel (touristique) qui percevra les revenus et supportera les charges pendant une période de 15 à 20 ans.
Pendant cette période, vous n’aurez aucune imposition, dépense imprévue ou risque locatif. À l’issue de cette période, vous récupérez le bien en pleine propriété (nue-propriété + usufruit) sans aucun surcoût et pourrez, au choix occuper votre bien, le vendre ou le louer.
Quelques notions à retenir
Répartition des charges :
On applique la même règle qu’un propriétaire et son locataire, le nu-propriétaire a à sa charge les grosses réparations tandis que l’usufruitier est tenu d’entretenir le bien. Le démembrement de propriété peut ainsi être une manière de permettre aux futurs propriétaires de s’assurer que le bien dont ils recevront à terme la pleine propriété aura été bien entretenu.
En cas de vente :
Même si les droits de l’usufruitier et du nue propriétaire sont indépendants, il est obligatoire d’avoir l’accord des deux pour céder la pleine propriété du bien. (ni l’usufruitier, ni le nu-propriétaire ne peuvent procéder seuls à la vente du bien démembré).
Attention au moment de la vente on calcule le pourcentage de l’usufruit selon l’âge de l’usufruitier donc la part lui revenant sera moindre !
En cas de décès du nu-propriétaire :
La nue-propriété est transmise aux héritiers et entre dans la succession, à la valeur de la nue-propriété seule.